mai 22, 2020

Envie de démarrer sa start-up au Cameroun? Attention: Ne croyez surtout pas aux 4 fables suivantes

L’Institut National de la Statistique (INS) révèle dans son 2e recensement général des entreprises au Cameroun que 79.1% des entreprises créées depuis 2006 sont des Toutes Petites Entreprises (TPEs) ou Start-up. Le même rapport mentionne que plus de 2000 de ces start-up ont fait faillite en seulement 8 années. L’INS explique ces faillites par plusieurs lacunes que rencontre les promoteurs de ces start-ups, à savoir l’incompétence en matière de management, le faible niveau d’étude, ainsi que la faible taille de ces start-ups.

A mon avis, plusieurs de ces faillites sont également dues au fait que les promoteurs manquent d’information et de retours d’expérience sur l’entrepreneuriat au Cameroun et ils se lancent uniquement par la force de leurs passions.

J’étais moi même confronté à ce problème d’information en 2017 lorsque je démarrais www.lohce.com le service d’achat de billets de bus en ligne au Cameroun qui compte déjà plus de 5000 utilisateurs. En m’appuyant sur mon expérience j’ai identifié plusieurs idées reçues ou “fables” auxquelles il faut faire attention lorsque vous démarrez votre start-up.

Voici 4 de ces fables et comment ne pas se faire piéger par elles si vous voulez démarrer votre start-up.

Fable #1 : “Attendre d’avoir le produit parfait avant de se lancer”

Une idée reçue et grandement partagée est que vous devez absolument créer un produit parfait avant de commencer. C’est assez logique, si vous n’avez pas le meilleur produit du marché, comment allez vous attirer des clients et gagner ceux de la concurrence ? n’est ce pas !?

Ce raisonnement met en évidence la culture de “l’aversion à l’échec entrepreneurial” qui est très répandue au Cameroun.

En effet, de manière culturelle, l’échec est négativement perçue au Cameroun. Ce qui est dommage car dans le contexte de l’entrepreneuriat, c’est tout l’opposée et “l’erreur est l’essence même de l’entrepreneuriat”. Interrogé sur son expérience Kevin Systrom (CEO d’Instagram) affirme que “La meilleure chose qui puisse arriver à un entrepreneur est d’échouer le plus vite possible”, Elon Musk (CEO Tesla, SpaceX et Co) va plus loin en disant “Vous devez apprendre à échouer rapidement”.

La réalité est que le produit parfait est construit petit à petit avec vos clients et cette construction se fera erreur après erreur;

En effet, le produit ou le service initial que vous mettez sur le marché aura très peu de chance de correspondre exactement à ce que recherchent vos clients. Dans le meilleur des cas Il sera incomplet et dans le pire des cas il ne les intéressera pas du tout.

Préparez vous donc à écouter activement vos clients et à faire des pivots: c’est à dire à changer légèrement ou drastiquement quelque chose dans votre produit afin qu’il se connecte bien à ce que veulent vos clients.

Fable #2 : “Tout le monde va utiliser ton produit, ça va marcher”

Une idée très répandue au début d’une start-up est que tout le monde va systématiquement partager l’engouement et la passion que vous ressentez pour votre produit. Vous croyez ainsi que les gens vont se bousculer pour acheter votre produit dès son lancement car il résout un réel problème que rencontre les Camerounais. En réalité il y a un seul moyen de vérifier cette affirmation: c’est d’exposer le produit au client et de voir s’il le paye avec son porte monnaie.

Votre base client ne va pas magiquement aller de zéro à “tout le monde”

Pour la simple raison que dans un marché, les clients ne sont pas tous pareils et n’ont pas les mêmes besoins. Dans son livre “Crossing the Chasm” Geoffrey A. Moore propose une répartition du marché par type de client.

 

Le Early market rassemble principalement deux types de clients : ceux qui vous connaissent tels que les amis et la famille (2.5 %) ou ceux qui aiment les produits nouveaux (13.5 %).

Ces deux catégories de clients sont celles qui seront exposées très tôt à votre produit et qui seront intéressées et enthousiastes de l’utiliser, même si votre produit n’est pas encore complet.

Par contre ils ne représente que 16% de vos clients. Le reste, 84 % est appelé le Mainstream Market et rassemble les clients qui attendent une expérience complète de votre produit.

Il est donc évident que “tout le monde” ne va pas avoir le même enthousiasme face à votre produit surtout dans ses premières versions.

Évitez de croire en cette hypothèse dès le début et prenez du recul sur votre produit afin de mieux cerner la plus value que vous fournissez selon le type de clients que vous visez.

Fable #3: “Tu dois rédiger ton business modèle des 2 prochaines années avant de te lancer”

Il est assez commun de s’intéresser à la rédaction du business modèle de votre start-up avant même de la démarrer. L’objectif est généralement de montrer aux potentiels partenaires ou investisseurs ce qui se passera à moyen et long terme dans votre start-up et que tout sera jolie (généralement).

Très simplement, un business modèle est la formulation de comment l’entreprise compte ramener de la valeur de ses clients. En gros : comment se fera t elle de l’argent ?

Ce document a plus de sens dans le cas d’une entreprise ayant déjà plusieurs années d’expérience dans son secteur d’activité et une bonne compréhension des besoins de ses clients. A contrario, l’expérience et la connaissances des clients sont des précieux éléments qu’une start-up doit rechercher constamment.

Dans le contexte très dynamique d’une start-up, s’investir à rédiger un document de business modèle moyen et long terme, se basant sur des hypothèses de potentiels clients représente tout simplement une perte de temps.

Le but premier d’un business modèle est celui de démontrer la viabilité des transactions de valeurs dans votre start-up. C’est à dire de démontrer de manière empirique:

  • Que vous apportez effectivement de la valeur à un client.
  • Que les clients vous retournent de la valeur en payant votre produit via leur porte-monnaie.
  • Que la valeur retournée par les clients permet, à minima, à faire vivre la start-up dune mois à l’autre.

Lorsque vous aurez cette formule, vous commencerez alors à comprendre comment faire vivre votre start-up dans votre secteur d’activité.

Basez vous sur vos feedbacks clients pour comprendre/chercher votre business modèle. Sachez que ce business modèle changera beaucoup et que cela peut prendre du temps avant que vous trouviez le business modèle qui fait sens pour votre start-up.

Fable #4: “Ce sera facile de recruter car il y a beaucoup de jeunes diplômés dehors”

Il est courant de penser que les éléments les plus importants dans un recrutement sont l’expérience et la compétence (formation).

En réalité dans une start-up, les personnalités des collaborateurs sont étroitement liées au quotidien. Il faut donc savoir réunir autour de vous des personnes qui, en plus d’être compétentes et expérimentées, peuvent et veulent travailler avec vous; soit parce qu’elles partagent la même vision que vous avez de la start-up et/ou parce qu’elles apprécient votre personnalité.

Et c’est là le plus gros challenge du recrutement dans une start-up. En effet, vous pouvez croire que n’importe qui peut travailler avec vous et vous permettre de produire votre solution. Cela n’est pas vrai !

Pour un résultat exceptionnel vous allez rechercher des personnes ayant une forte expérience afin que les choses soient bien faites et vite.

Même si ces personnes peuvent être intéressées par votre projet il est courant que vous n’arriviez pas à les intéresser financièrement du moins pour le moment.

Donc oui il y a beaucoup de jeunes formés et en recherche d’emploi mais il n’y a pas forcément autant de personnes désireuses et capables de travailler avec vous sur votre projet.

Prenez le temps qu’il faut pour rechercher minutieusement vos collaborateurs. Sélectionnez les avec soin. De bons ingrédients font de bons repas, la même chose ne peut pas être dites des mauvais ingrédients.

En conclusion

Il y aura mille et une choses à faire pour que votre start-up soit à l’image merveilleuse que vous vous faites actuellement.

Ne vous laissez pas distraire ni submergé !

C’est en vous lançant et en commençant avec votre produit dans sa version la plus primaire que vous allez rencontrer vos clients; et si vous les écoutez attentivement, ils vous diront comment l’améliorer votre produit progressivement afin qu‘il leur apporte le plus de valeur possible.

En échange d’un bon produit les clients vous rendront de la valeur en retour et cette valeur vous permettra de mieux anticiper et planifier le future de votre start-up mais aussi de rechercher les collaborateurs avec lesquels vous allez continuer à construire votre produit.

Soyez extrêmement regardant sur les recrutements que vous ferez, ne vous arrêtez pas à la compétence, ni à l’expérience. Recherchez également la personnalité surtout une qui soit compatible avec la votre.

Et vous à laquelle de ces fables avez vous été le plus exposé ?

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